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Sculpture - Barnabé, l'homme lent

Peut-être que pour certains artistes le 1er confinement fut une période d'intense production, mais pour moi il fut un temps d'arrêt. 

Le temps est brutalement suspendu, le monde en pause.

 

Notre civilisation, au moins depuis la renaissance, est basée sur la vitesse , sur l'accélération, de plus en plus vite, de plus en plus loin.......

Des moulins à vent aux éoliennes, il n'y a que Don Quichotte qui s'interpose prônant la lenteur, mais en cause perdue d'avance.

 

Depuis tout petit, on m'a appris que la paresse faisait partie des 7 péchés capitaux. Et voilà que soudain l'on me dit ne bouge pas reste immobile, et ainsi le monde sera sauvé.......

 

 

Comment ne pas se remettre en question. Nous n'avons eu de cesse que de globaliser le monde. Nous l'avons rétréci, la vitesse a annihilé les distances.

Et dans ces rouages que l'on croyait si bien huilés, une particule microscopique, surnommée "covid 19", vient se glisser et tout s'arrête.

Mais là, nous n'avions pas anticipé l'ampleur et la rapidité du phénomène.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

A vouloir aller toujours plus vite, nous n'avons pas pris le temps de se poser, de lever la tête et d'observer le monde.

 

 

Alors oui, j'ai passé beaucoup de temps dans mon jardin, faisant parti de ces privilégiés hors circuit.

Et la nature me l'a bien rendu. Les abeilles étaient au rendez-vous. Jamais les tomates ne furent plus abondantes. Le hérisson a même fait un tout petit. Et à la nuit tombée, les vers luisants lançaient leur signal lumineux.

 

Lentement l'idée de cette sculpture m'est apparue.

"L'homme lent" dans notre société c'est l'autre, c'est le laissé pour compte, celui qui n'est pas dans le circuit. 

Mais peut-on le réduire simplement à cela.

Je ne sais quelle place "le monde d'après" est prêt à lui faire.

Quant à moi, j'ai pris conscience de sa grandeur et ai tenté de la transcrire à travers cette oeuvre.

 


"Barnabé, l'homme lent"

La pierre de Lens, cette pierre vieille de plus de 110 millions d'années, ancre le personnage dans le temps où il trouve ses racines.

Immobile, la tête levée, tous ses sens sont en éveil. Il absorbe, il analyse, il médite........ Il faut savoir l'écouter.

 

Quant à ses vêtements, j'ai longuement retravaillé sur la technique de recyclage des fibres végétales (technique que j'ai commencé à envisager dés 2019 à travers "Les colosses", "In extremis"...). .....Recyclage et circuit court......

 

La dorure à la feuille s'est imposée à moi. Peut-être parce c'est une technique qui s'inscrit dans le temps, qui ne s'improvise pas, demande de longues préparations et surtout des gestes lents et précis.

Mais au delà de cela, j'ai voulu m'attacher à la symbolique de l'or, richesse ultime. Le temps est un bien précieux, le temps à l'arrêt est un joyau rare. Est ce que le confinement nous a fait prendre conscience de cela ?

 

Les bleus de Philippe de Champaigne m'ont, sans doute, fortement inspiré. Pourquoi ce choix, parce que pour moi, il invite à la méditation.

Peut-être aussi parce qu'il est devenu, aujourd'hui, une couleur consensuelle. N'est elle pas comme nous le révèle Michel Pastoureau la couleur préférée des européens ?

 

"L'essentiel est invisible pour les yeux" nous dit Saint- Exupery-

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Commentaires: 2
  • #1

    martine siffert (dimanche, 08 novembre 2020 11:26)

    Je découvre cet Homme Lent, tel un grand chef africain drapé dans ses plus beaux atours, à la fois prestigieux (l'or), et portant à la méditation, le bleu des eaux originelles, je n'irai pas jusqu'à la mini-vague bleue qui a balayé le clown malfaisant des USA...
    Que voilà de la belle ouvrage ! Dans ces temps de ralenti, tu n'as pas compté les heures, d'ailleurs quand on aime, on ne compte pas...
    Merci d'avoir mis au monde ce Barnabé prince du temps.
    Admirativement et amicalement.

  • #2

    desjobert (dimanche, 08 novembre 2020 20:30)

    Bonsoir vous deux
    Pour toi Hervé:
    ce que j'aime dans ton nouveau Barnabé c'est son regard vers le haut, sa recherche qu'on sent de l'intérieur,ce lent mûrissement de l'être jusqu'au jour où le sage sortira ses bras pour ..nous embrasser?( entre autres).Tu as remarqué que les lamas ont toujours un bras libre, à l'air, quand tout le corps est recouvert;jusqu'à présent, je les plaignais:se geler à moitié, c'est pas drôle!;mais là, devant ton Barnabé,je sens que cette ouverture va venir;on a confiance:tu vas
    nous sortir de là.à voir Barnabé on s'aère, un souffle va venir.
    Merci Hervé de nous faire partager ton évolution artistique
    je vous aime ainsi que les abeilles, les hérissons et les vers luisants et le jardin tout entier.Martine a raison c'est un prince du temps, ton Barnabé
    Bisous à Lili et toi
    Ginou